Un peu d’histoire...
Se questionner sur notre rapport à l’environnement n’est pas récent.
Le développement durable est à la croisée de l’environnement, du social et de l’économie.
Le nom originel en anglais est « sustainable development ». Il est intéressant de voir que ce terme « sustainable » viendrait du vieux français « soustenir ». Cette expression est par ailleurs utilisée dans une ordonnance française de 1346 sur la gestion soutenable des forêts.
« les maîtres des eaux et forêts enquerront et visiteront toutes les forez et bois et feront les ventes qui y sont, en regard de ce que lesdites forez se puissent perpétuellement soustenir en bon estat ».
Ordonnance de Brunoy, édictée en 1346 par Philippe VI de Valois.
On y voit un lien à l’environnement de type gestion de ressources avec un aspect économie de marché incluant une vision à long terme.
L’aspect environnemental
En 1972, le premier rapport du Club de Rome [1] indique des complications majeures liées la poursuite de la croissance économique.
Celle-ci entraînerait au cours du XXIe siècle, surtout en fin de siècle vers 2100, une chute brutale de la population à cause de la pollution trop importante, de l’appauvrissement des sols cultivables et de la raréfaction des ressources énergétiques. [2]
Le rapport Brundtland
Ce rapport du Club de Rome inspirera « la commission mondiale sur l’environnement et le développement », alias la « commission Brundtland ».
Il s’agit d’une commission qui dépend de l’ONU dont le but est « de répondre au conflit entre (…) la croissance économique mondialisée et la catastrophe écologique émergente à l’échelle mondiale ». Le défi est d’« harmoniser la prospérité avec l’écologie et de répondre aux besoins de ce qui était alors perçu comme le monde en développement, en injectant explicitement les normes de justice sociale dans la dynamique d’un Sud mondial en ébullition incessante » [3]. La commission est fondée en 1983 et dissoute en 1987. À sa dissolution, elle rédige un rapport intitulé « Notre avenir à tous ».
Ce rapport utilise le terme anglais de « Sustainable development ». Le terme de « développement » dans « développement durable » n’est pas étonnant, il est présent dans l’intitulé même de la commission. Il en est un axiome, qui n’a donc pas besoin de démontrer sa présence. À cette époque, pas question de décroissance ou de stabilité.
« Durable » est également un terme critiqué, et cela, depuis la traduction du rapport de Brundtland en 1987, qui introduit le terme de « développement durable ». Dans la première édition du rapport de Brundtland la traduction de l’anglais « sustainable development » est « développement durable ». Cependant, elle sera par la suite « développement soutenable » dans la deuxième édition réalisée par « Les Éditions du Fleuve » en 1988. Cette traduction aurait été faîte à la demande de la commission elle-même. [4]
En corrigeant cette traduction, on retrouve le terme « soutenable » qui fait lien avec le vieux français « soustenir ».
Durable ou soutenable ce développement ?
À vrai dire, dans le monde anglophone, si l’on parle de « sustainable practices » (pratiques soutenables), ou de « sustainability » (soutenabilité), le terme se porte très bien sans parler de développement.
En France, « soutenabilité » a un sens plus large, plus polysémique… Des expressions comme « c’est insoutenable ! » apportant un nuance plus imagée.
Personnellement, je préfère le terme « soutenabilité » au quotidien. Cependant, pour la communication, « le développement durable » est bien plus identifiable pour toucher un public le plus large possible. En espérant que cela change ;)
En tout cas, quels que soient les mots utilisés, pour moi, c’est avant tout les pratiques qui prônent.
Comme toujours en linguistique, c’est l’usage qui finit par l’emporter ! Je n’irais pas me battre sur ce sujet, ça serait, à mon sens, vain comme dépense d’énergie...